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Diffusions, réceptions, appropriations et traductions de l’œuvre de Marcel Proust au Brésil (1913-1960)

 

Etienne Sauthier, Docteur associé au CREDA (Centre de Recherche et de Documentation sur les Amériques) UMR 7227 – etienne.sauthier@gmail.com

 

Thèse d’Histoire préparée par Etienne Sauthier à l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, sous la direction des professeurs Olivier Compagnon et Laurent Vidal et soutenue le 05 décembre 2014, devant un jury composé de Mme. Laura de Mello e Souza (Université Paris-Sorbonne), Mme Idelette Muzart-Fonseca dos Santos (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), Mme Emmanuelle Loyer (Institut d’études politiques de Paris), M. Olivier Compagnon (Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle / IHEAL / CREDA), M. Darién J. Davis (Middlebury College, Middlebury, Vermont, USA), M. Laurent Vidal (Université de La Rochelle), 603 p.

A obtenu la mention Très Honorable avec les félicitations du jury à l’unanimité


L’observation de la diffusion, de la réception et de la traduction de l’œuvre de Proust au Brésil permet de penser en filigrane la construction de l’identité nationale brésilienne au long du XXe siècle, grâce notamment au regard porté dans le pays sur ce qui vient de l’étranger. Cette étude d’une identité culturelle et intellectuelle brésilienne en cours de mutation se fera ici à partir de l’analyse d’un cas spécifique, celui que constitue le parcours de l’œuvre de Proust dans ce pays.


Ce qui peut rapprocher une œuvre comme celle de Proust, aussi centrée, a priori, sur l’espace culturel français, et en particulier parisien, de son espace de réception brésilien, pose question. Cette circulation et ses soubresauts sont observés entre 1913, date de publication de Du côté de chez Swann en France, et 1960, moment où le Brésil semble être devenu, grâce à divers phénomènes culturels, qu'ils soient élitistes ou plus populaires (football, littérature brésilienne, modernité de la nouvelle capitale, succès de la Bossa Nova, etc… ), un espace d’émission culturel au niveau international, et non plus un simple récepteur. Dans ce pays en profonde mutation culturelle, le rapport à l’Europe et à la France en particulier, comme à une culture importée, qu’il s’agit d’étudier. L'étude croise, à cet effet, plusieurs méthodes d'analyse : esthétique de la réception1, transfert culturel2, histoire des élites3 etc.


Une circulation culturelle n’étant pas un processus plat, elle s'inscrit dans un processus chronologique que l'on pourra saisir en déterminant un certain nombre de bornes chronologiques, délimitées par des moments de ruptures.


Ainsi, un premier temps de la traversée de l’œuvre de Proust au Brésil est défini entre 1913 et 1922 : de la publication à Paris de Du Côté de chez Swann à la parution des premiers articles critiques brésiliens évoquant l’œuvre. La période allant de 1922/23 à 1933 se termine sur l’intégration de Proust à une pensée nationale identitaire brésilienne, au moment où il est fait référence à l’auteur dans la préface de Casa Grande e Senzala (Maîtres et esclaves) de Gilberto Freyre4, œuvre fondatrice de la sociologie brésilienne. L’auteur n’en est pas moins reçu par une élite très réduite en taille, du fait que le livre ne circule dans le pays qu’en langue française, jusqu’en 1948, il et qu'il faut tenir compte, par ailleurs, du faible taux d’alphabétisation dans le Brésil des années 1920 (environ 64% d’analphabétisme au recensement de 1922). La période allant de 1933 à 1948 mène aux débuts de la traduction en langue portugaise de Proust au Brésil, moment d’une nouvelle traversée de l’œuvre et d’une nouvelle intégration de celle-ci à l’espace culturel brésilien. Enfin, la période allant de 1948 à 1960 étudie l’assimilation en langue portugaise de l’œuvre de Proust dans l’espace de réception brésilien, en bonne partie de manière concomitante au processus de publication des volumes de l’œuvre proustienne en traduction portugaise. Cette réception se fait également à travers les nouveaux médias d’une culture de masse en cours de consolidation.


Dans un pays de la taille du Brésil, c’est aussi en adoptant une perspective géographique et territoriale qu’il faut penser la circulation de l’œuvre proustienne. Cela permet ainsi de constater que l’espace national est culturellement très morcelé et que seule l’élite, par sa mobilité et ses sociabilités, permet d’homogénéiser l’identité brésilienne, ou du moins de fondre les divers espaces d’expérience nationaux au creuset d’une identité, d’un horizon d’attente national commun. Si, à mesure que Proust devient une référence puis un classique dans le pays, en langue française puis en langue portugaise, il acquiert une réception plus universelle et plus proche du texte, en parallèle , tout au long de la période, des lectures régionales de l’auteur, en résonance avec les problématiques culturelles et intellectuelles de chaque espace d’expérience, se maintiennent, et bien souvent, ces lectures diffèrent, lorsqu’elles ne s’opposent pas. L’observation des seuls espaces que constituent Rio de Janeiro, São Paulo et le Nordeste, permet de s’en convaincre.


Ainsi à Rio de Janeiro, dans les années 1920, une réception empathique accueille et critique l’œuvre plus ou moins au même rythme que la critique française en rend compte. La capitale brésilienne se pose ainsi en espace culturel alternatif à part entière, refusant, de cette manière, un certain complexe de la périphérie par rapport aux centres culturels européens. Dans les années 1940 et 1950, au moment de la redécouverte de l’œuvre proustienne, le monde intellectuel et littéraire carioca prolonge cette réception empathique de Proust et met en scène, par la publication d’anthologies de la critique brésilienne de l’auteur, une tradition critique brésilienne continue de celui-ci. Dans la capitale brésilienne se développe aussi une association proustienne, ayant pour but d’étudier et de vulgariser l’auteur dans le pays, mais aussi d’exporter la critique brésilienne de Proust vers l’Europe, notamment par la réalisation de traductions en français, publiées au Brésil mais résolument destinées à une lecture française, de certains critiques brésiliens.


À São Paulo les élites ont, depuis son entrée dans le pays, un tout autre rapport à l’auteur ; en effet, bien qu’il arrive que les qualités littéraires de Proust y soient reconnues (notamment dans la revue Klaxon), il semble régner dans le monde intellectuel paulista un relatif silence ou un regard critique à son égard, fruit du rejet, par les élites de São Paulo, d’un héritage culturel européen dont la Première Guerre mondiale consacre, à leurs yeux, la faillite. Ce regard paulista sur l’œuvre proustienne perdure autour de 1940 : la redécouverte brésilienne de l’auteur semble partir de São Paulo en 1941, avec l’article que lui consacre Ruy Coelho dans la revue Clima. Cependant, la perspective de cet article est critique, et si l’auteur est minutieusement analysé, la conclusion de Ruy Coelho voit en Proust un auteur du passé. Par ailleurs, tout au long des décennies 1940 et 1950, l’œuvre proustienne reste nettement moins présente dans la presse comme l’actualité littéraire et intellectuelle de São Paulo que dans celles de Rio de Janeiro.


Le cas du Nordeste est particulier. En effet, l’œuvre qui y arrive de manière assez romanesque y est rapidement lue, commentée et critiquée dans une perspective régionaliste profondément liée au moment culturel vécu par la région dans les années 1920. L’accent est ainsi mis sur Du Côté de chez Swann et rapidement, les lecteurs de Proust dans la région, assimilent l’opposition de Combray à Paris à celle du paradis perdu de l’enfance contre l’espace de la vanité et du temps perdu que représente la ville : la périphérie contre le centre, et en ce sens, le Nordeste contre les capitales culturelles que sont Rio de Janeiro et São Paulo. C’est par ailleurs dans le prolongement de cette lecture régionaliste que l’auteur de la Recherche est intégré, en 1933, par Gilberto Freyre, à la définition de l’identité brésilienne qu’il construit dans Casa Grande e Senzala. La même problématique régionaliste dans la réception nordestine de l’œuvre de Proust se maintient après la Seconde Guerre mondiale. On constate ainsi que très rapidement, certains lecteurs nordestins de l’auteur retrouvent toujours en Proust leur attachement à leur région d’enfance et à leurs racines, et vont puiser cette lecture essentiellement dans le Combray de l’enfance du narrateur.


Ainsi tout au long de la période, ces lectures, qui sont le fait d’espaces d’expérience différents, perdurent, fruits d’une identité nationale profondément morcelée et d’une lecture de l’auteur de la Recherche à travers le prisme des réalités différentes de ces divers espaces culturels nationaux. Seule l’élite nationale, à travers ses sociabilités comme la mobilité de ses membres, tend à créer des perméabilités entre ces espaces culturels, à homogénéiser l’identité culturelle nationale à partir de ces espaces morcelés, et à en faire un composé de ceux-ci.


Le rapport à l’Europe n’en reste pas moins un élément structurant de l’identité culturelle nationale brésilienne en cours de construction. En effet, tous les espaces culturels brésiliens se positionnent, de manières diverses, face à un interlocuteur culturel européen, et le fait que l’œuvre de Proust trouve une place différente dans tous ces espaces, que celle-ci soit dans l’élite, à partir du début des années 1930, un élément de distinction culturelle, est un indice du rôle moteur de l’héritage culturel européen dans cette construction nationale brésilienne. En effet, le fait que la Recherche circule en langue française jusqu’en 1948 n’empêche pas l’auteur de devenir, auprès de l’élite brésilienne, une référence, puis, au moment où elle entre dans les programmes d’entrée des universités brésiliennes, un classique. Force est dès lors de conclure à une forte présence de la culture française tout au long de la période dans le pays, quand bien même l’auteur en langue française pourrait bien ne pas être connu dans le texte par tous ses commentateurs brésiliens d’avant 1948.


La traduction de Proust au Brésil constitue une reconnaissance de fait de l’importance de l’auteur comme référence littéraire : celle-ci l’offre simplement à une élite auprès de laquelle elle était déjà un élément de distinction culturelle, et qui ne pouvait, le plus souvent, la lire de première main. Le fait que la traduction soit un phénomène qui, dans sa dimension systématique, est nouveau dans le Brésil du XXe siècle est aussi le signe que l’élite nationale, peut-être parce qu’elle s’élargit peu à peu, perd son rapport privilégié à la langue française. Le succès éditorial de ces traductions récentes d’auteurs français tend, quant à lui, à montrer que cette perte du rapport à la langue n’implique pas un divorce culturel avec l’Europe, et la France en particulier. Il s’agit là d’une dissociation entre la langue et la culture plutôt que du signe d’une désaffection culturelle qu’évoquent certains historiens. C’est dans cette optique qu’il s’agit plutôt d’envisager la mutation des rapports culturels à l’Europe dans le Brésil de la période.




 

1 Hans Robert Jauss, Pour une esthétique de la réception, Paris, Gallimard, 1978.

2 Michel Espagne, Les transferts culturels franco-allemands, Paris, PUF, 1999.

3 Sur la notion d’élites en histoire, voir : Frédérique Leferme-Falguières, Vanessa Van Renterghem, « Le concept d’élites. Approches historiographiques et méthodologiques », Hypothèses 2000, revue de l’École doctorale de l’Université de Paris 1 - Sorbonne, 2001, p. 57-67.

4 Gilberto Freyre, Casa Grande & Senzala : formação da família brasileira sob o regime de economia patriarcal, Rio de Janeiro, Maia & Schmidt, 1933, p. 36.

 



 

 



Une poétique de la déflation

chez Fernando Assis Pacheco et Adília Lopes

 

Thèse soutenue par Gonçalo Jorge Neves Dias Duarte Santos


préparée à l’Université Paris IV Sorbonne sous la direction de Madame le Professeur Maria Graciete Besse, avec l’appui financier de la FCT – Fundação para a Ciência e a Tecnologia, dans le cadre du programme QREN - POPH/FES.


Soutenue publiquement le lundi 1er décembre 2014 à la Maison de la Recherche de l’Université Paris-Sorbonne.


Dans le cadre de l’évolution poétique des dernières décennies au Portugal, il n’est pas aisé de situer les œuvres de Fernando Assis Pacheco (Coimbra, 1937 – Lisbonne, 1995) et d’Adília Lopes (Lisbonne, 1960). Tour à tour, ces deux auteurs ont offert des propositions originales et audacieuses face aux principales tendances poétiques de leur temps (leurs premiers volumes datent de 1963 et 1985). Un rapprochement entre les deux poètes n’a jamais été proposé ; pourtant, il paraît tout autant valide que pertinent. Les intentions qui président à leur art, les stratégies auxquelles ils recourent pour les mettre en œuvre et les effets qu’ils obtiennent révèlent ainsi des points de contact et suggèrent une poétique commune. En effet, la poésie de Fernando Assis Pacheco étonne dès lors qu’elle s’offre à lire comme une « poésie “mineure” » ou « sans ambition », selon la formulation de Gustavo Rubim1 ; celle d’Adília Lopes choque en ce qu’elle présente un « langage “pauvre” » et une « faible dignité ontologique », comme le souligne Osvaldo Manuel Silvestre2.


Trois caractéristiques communes peuvent être identifiées dans les œuvres de Fernando Assis Pacheco et Adília Lopes ; elles sont régulièrement signalées dans la biographie passive existante au sujet de ces deux poètes. En premier lieu, un sabotage du langage poétique traditionnel est opéré, par l’usage de stratégies inhabituelles, par l’irruption du prosaïsme et par le recours à la narrativité. Ensuite, le sujet poétique subit une dévalorisation par rapport aux manières habituelles de le représenter : dans le poème, il ne revendique pas l’importance qui devrait lui revenir, il se déguise ou se dissout dans les gestes du quotidien ou alors il cède la place à d’autres protagonistes. Enfin, le monde représenté dans ces textes est loin d’être des plus communs en poésie : la matière convoquée par le poème est très concrète, triviale, peu appropriée à la tradition lyrique.


Les éléments apparentés chez les deux auteurs peuvent donc être répartis en trois opérations qui portent sur le langage poétique, sur le sujet lyrique et sur la conception du monde. Ces trois grandes caractéristiques sont liées entre elles, de par leurs modes de concrétisation et les intentions qui les sous-tendent. On y retrouve un même projet de « dégonflement » d’un langage poétique grandiloquent et ampoulé, d’un sujet lyrique prétentieux et qui se prend trop au sérieux, d’une conception du monde excessivement épurée ou tendant vers le transcendantal. Du reste, dans la seconde moitié du XXe siècle, ces instances correspondent déjà dans une large mesure à des objets vides. Néanmoins, cette opération de dégonflement ne s’assimile pas à une action proprement déconstructiviste qui aurait pour but de démontrer la vacuité de tels référents. Au contraire, l’intention de Fernando Assis Pacheco et Adília Lopes semble, à travers des formes alternatives et personnelles de concevoir le langage, le sujet et le monde, de transmettre à ces entités un « souffle » qui leur confère une force animique et une capacité d’intervention.


C’est sur la base de ce double mouvement – réduction de valeur et souffle vital – qu’est proposée le terme de « poétique de la déflation » afin d’examiner, de manière comparative, l’ensemble de ces aspects chez les deux auteurs. En effet, le Le Petit Larousse 2012, par exemple, signale deux acceptions pour le terme déflation. La première, économique (et dans ce cas, le terme s’oppose à inflation), indique une « diminution continue et forte du niveau général des prix », associée normalement à une contraction de l’activité économique. La seconde acception est géomorphologique et correspond à l’« entraînement par le vent des matériaux les plus fins d’un sédiment meuble ». On retrouve, dans l’origine étymologique latine du mot, dans le premier cas – et par antonymie –, le terme inflare (gonfler) ; et, dans le second cas, le terme flatus (souffle).


L’adoption de ce prisme de la déflation semble la meilleure manière d’examiner le modèle sous-jacent des œuvres de Fernando Assis Pacheco et d’Adília Lopes, pierre angulaire de l’élaboration de leurs poétiques et qui leur concède une surprenante vitalité. Il convient de remarquer que ce même terme a d’ailleurs été utilisé dans la réception critique des deux poètes. Ainsi, Manuel Gusmão a interprété le travail de Fernando Assis Pacheco comme « une poétique de déflation du pathos lyrique »3. Auparavant, Américo António Lindeza Diogo avait déjà évoqué, chez Adília Lopes, un « ton délibérément mineur, déflaté »4 ; et, de même, António Guerreiro avait identifié chez cette poétesse un « jeu de déflation poétique »5. Par un acte de pillage d’ailleurs commun aux auteurs étudiés, il a donc été décidé de faire de ce terme le concept fondamental qui guide cette recherche.


Le travail se décompose en trois parties, articulées autour des trois caractéristiques énoncées ci-dessus et de l’idée exprimée par Michel Collot, selon laquelle « [t]oute expérience poétique engage au moins trois termes : un sujet, un monde, un langage »6. Ainsi, sont étudiés successivement la façon dont Fernando Assis Pacheco et Adília Lopes s’engagent dans une procédure de déflation du langage poétique qu’ils utilisent ; le sujet lyrique qu’ils figurent ; et la conception du monde que dénote leur poésie.


Dans la première de ces trois parties, et en tenant compte du fait que l’aspect le plus travaillé dans les études antérieures sur ces deux auteurs est probablement la particularité de leurs langages poétiques, l’analyse a été centrée sur le cas spécifique des formes narratives utilisées. Cette dimension de leur poésie n’est pas sans importance, comme cela a été observé par exemple par Gastão Cruz7ou José Carlos de Vasconcelos8et par Pedro Eiras9 ou Flora Süssekind10. Dans le premier chapitre, la problématisation du concept de poésie narrative, afin dele rendre opérationnel, oblige à considérer des concepts complexes comme celui de mimèsis ou de lyrisme (et à partir des prises de positions assez diverses, d’Aristote à Paul de Man). Ensuite, tout en sachant qu’il s’agit là d’un domaine vaste et diversifié, sont analysées quelques-unes des formes narratives utilisées par les deux auteurs, de manière à définir une typologie et à étudier les procédés mis en œuvres dans ce cadre. Enfin, l’étude de deux cas concrets de tentatives déflatées de rapprochement de la poésie avec le roman (et en prenant appui, par exemple, sur les travaux de Franco Moretti ou de Jean-Marie Schaeffer), choisit pour objets d’analyse respectifs CâuKiên : um resumo, de Fernando Assis Pacheco (ouvrage de 1972, modifié en 1976 sous le titre Catalabanza, Quilolo e volta) et Maria Cristina Martins, d’Adília Lopes (1992).


Dans la deuxième partie, est analysée la figuration du sujet lyrique, question capitale, comme l’ont notamment fait remarquer, pour Fernando Assis Pacheco, NunoJúdice11et, pour Adília Lopes, Ana Bela Almeida et Burghard Baltrusch12. Cette analyse repose, dans un premier temps, sur des questions théoriques relatives au statut du sujet lyrique et au concept de figuration (à cette fin, seront étudiées des positions aussi diverses que celles de l’abbé Batteux et de Käte Hamburger, de même que les travaux plus récents dans ce domaine réalisés par des chercheurs comme Dominique Combe ou Antonio Rodriguez). Ensuite, et en partant de la notion de « fluidification » – qui a déjà été proposée pour chacun des deux auteurs par Fernando Pinto do Amaral13 et Luís Quintais14 respectivement –, l’étude est centrée sur les modes spécifiques de figuration du sujet chez les deux poètes, tant du point de vue, complexe, de l’autographie que de celui de la frontière entre figuration et fiction (ici encore avec des appuis théoriques, qui vont de Serge Doubrovsky à Laurent Jenny). Le dernier chapitre de cette partie s’attache à examiner des cas particuliers de figuration déflatée du sujet, chez Fernando Assis Pacheco, à travers un rapprochement vers l’autobiographie en vers, dans Variações em Sousa (dont la version définitive date de 1987), et chez Adília Lopes, à travers l’utilisation d’un alter ego qui interroge l’idée de succès, dans O poeta de Pondichéry (1986) et O marquês de Chamilly (1987).


Dans la troisième et dernière partie, l’étude s’interroge sur la manière de représenter le monde dans les œuvres des deux auteurs, en s’attachant à la dimension éthique qui y est implicite. Ce sont là des aspects qui ont intéressé, par exemple, en ce qui concerne Fernando Assis Pacheco, Joaquim Manuel Magalhães15 et Abel Barros Baptista16 ou, en ce qui concerne Adília Lopes, Rosa Maria Martelo17et Luís Parrado18. Cette partie commence par une remise en question du pouvoir interventionnel de la poésie, à partir d’une grande diversité de réflexions (de Jean-Claude Pinson à Michel Foucault, de Pier Paolo Pasolini à Georges Didi-Huberman) et de l’analyse de la dimension critique de la poésie contemporaine. Dans un second chapitre, est analysée la dimension axiologique qu’offre la poétique de la déflation commune à Fernando Assis Pacheco et à Adília Lopes, d’abord de manière générale et ensuite à partir du concept d’« être quelconque » de Giorgio Agamben. Enfin, en s’intéressant aux perspectives déflatées de relation à leur époque qu’offrent Cuidar dos vivos (1963) de Fernando Assis Pacheco ainsi qu’Apanharar (2010) et Andar a pé (2013) d’Adília Lopes, l’étude cherche à comprendre comment cette poésie naît du quotidien (en s’appuyant sur quelques travaux tirés de la sociologie, d’Henri Lefebvre, Zygmunt Bauman ou Alain Touraine).


Il ressort de cet exposé qu’au sein de chacune des parties du travail, trois étapes se succèdent, auxquelles correspondent une réflexion de fond sur la base d’appuis théoriques, une analyse d’aspects généraux à partir de la confrontation des productions poétiques des auteurs étudiés, et une étude de cas qui privilégie certains titres en particulier au sein de leurs œuvres. Ce parcours permet de mettre en évidence qu’à chaque niveau évoqué – langage, sujet, monde – la déflation, dans sa double acception, est le principe directeur de la poésie de Fernando Assis Pacheco et d’Adília Lopes.

 

 



 

1 Gustavo Rubim, « Posfácio », in Pacheco, Fernando Assis, Variações em Sousa, Coimbra-Lisbonne: Cotovia etAngelusNovus, 2004, p. 58.

2 Silvestre, Osvaldo Manuel, « A idade maior », in Expresso - Cartaz, 20.11.1999, p. 35.

3 Manuel Gusmão, « Respiração Assistida – algumas notas para lhe assistir », in Pacheco, Fernando Assis, Respiração Assistida, Lisbonne: Assírio & Alvim, 2003, pp. 66.

4 Américo António Lindeza Diogo, « O novo livro de Job », in Companhia dos poetas: pastoral, cepticismo, museu imaginário, col. Cadernos do Povo – Ensaio, Braga – Pontevedra : Irmandades da fala da Galiza e Portugal,1997, p. 97.

5 Guerreiro, António, « Entre a rua e o mundo », inExpresso – Actual, 19.01.2008, p. 41.

6 Collot, Michel, La poésie moderne et la structure d’horizon, Paris : Presses Universitaires de France, 1989, p. 5.

7 Gastão Cruz, « Fernando Assis Pacheco – CâuKiên: um resumo », in A poesia portuguesa hoje, Lisbonne: Plátano, 1973, pp. 199-201.

8 Vasconcelos, José Carlos de, « Assis, em seis andamentos », in Jornal de Letras nº 456, 02.04.1991, p. 11.

9 Eiras, Pedro, « Economia e libertação », in Relâmpago nº 9, Lisbonne: Fundação Luís Miguel Nava et Relógio d'Água Editores, 2001, pp. 176-178.

10 Flora Süssekind, « Com outra letra que não a minha », in Lopes, Adília, Antologia, Rio de Janeiro-São Paulo : 7 Letras et Cosac&Naify, 2002, p. 203-224.

11 Júdice, Nuno, « Uma poesia da vida », in As máscaras do poema, Lisbonne: Aríon Publicações, 1998, p. 222-225.

12 Almeida, Ana Bela et Baltrusch, Burghard, « Entre o essencialismo rural de Fisteus e o pós-modernismo urbano de Lisbonne – uma comparação (im)possível entre Lupe Gómez e Adília Lopes », in Actas do VII Congresso Internacional de Estudos Galegos. Mulheres en Galicia. Galicia e outros pobos da Península. Barcelona 28 ó 31 de maio de 2003. Barcelona, Sada: Ediciós do Castro, 2007, p. 299-311.

13 Fernando Pinto do Amaral, « “ Canção do ano 86 ” - Fernando Assis Pacheco », in Silvestre, Osvaldo Manuel et Serra, Pedro (org.), Século de ouro - Antologia crítica da poesia portuguesa do século XX, Braga – Coimbra – Lisbonne : Angelus Novus et Cotovia, 2002, p. 375-378.

14 Quintais, Luís, « Uma arte da leveza », in Relâmpago nº 25, Lisbonne: Fundação Luís Miguel Nava, octobre 2009, p. 143-145.

15 Magalhães, Joaquim Manuel, « Fernando Assis Pacheco, uma publicação póstuma », in Expresso – Actual, 03.07.2004, p. 60-61.

16 Baptista, Abel Barros, « Respiração assistida », in Ler: Livros & leitores nº 110, Lisbonne : Círculo de Leitores, février 2012, p. 12.

17 Martelo, Rosa Maria, « Contra a crueldade, a ironia », in A forma informe - leituras de poesia, Lisbonne: Assírio & Alvim, 2010, p. 223-234.

18 Parrado, Luís, « Adília Lopes. Resiste, move-se e escolhe “ Andar a pé ” », in Jornal i – LiV, 19/10/2013, p. 10-11.

 



 

 

 

 

 

 

La scène musicale paulistana : théâtre musical et chanson populaire dans la ville de São Paulo (1914-1934)

 

Virginia de Almeida Bessa

 

 

Thèse préparée en cotutelle, sous la direction de Mme Idelette Muzart - Fonseca dos Santos (Université Paris Ouest Nanterre La Défense) et de M. José Geraldo Vinci de Moraes (Université de São Paulo – USP), soutenue le 26 septembre 2012 à São Paulo, Brésil, en visioconférence.

 

 

La thèse cherche à saisir l'importance du théâtre musical joué à São Paulo entre 1914 et 1934 sous deux aspects particuliers: d'une part, dans son rapport avec le processus plus large de formation de la chanson populaire au Brésil; d'autre part, en tant qu'espace d'invention d'une identité paulista qui, à son tour, a nourri la production de chansons de la ville de São Paulo.

 

Ce qu'on appelle théâtre musical réunit tout un ensemble de genres théâtraux intercalant chansons et dialogues, tels que l’opérette, l’opéra-comique, la revue et la burleta, lesquels sont devenus un des principaux moyens de diffusion de la chanson populaire brésilienne avant le développement de l'industrie du disque et de la radio au au Brésil.

 

Par formation de la chanson, on comprend le processus historique au long duquel certaines manifestations de la chanson populaire brésilienne ont constitué, peu à peu, un système d'œuvres reliées entre elles par une continuité de tradition1. Ce système, que l’on peut nommer « chansonnier », présuppose l’existence d’un triangle d’interactions dynamiques entre producteurs, récepteurs et mécanismes de transmission. Bien que ce triangle existait au Brésil depuis la fin du XIXe siècle, quand le piano et le commerce de partitions ont rendu possible la diffusion d’un répertoire partagé par les différents groupes sociaux brésiliens, il n’a acquis des réels contours qu’au début du XXe siècle, en intégrant le processus alors naissant de massification de la culture, avec le théâtre musical, la phonographie et la radio.

 

La principale contribution du théâtre musical à ce système s'est faite par le biais des personnages-types qui, en chantant sur scène, sont devenus des énonciateurs importants de la chanson populaire. Ici, le théâtre musical joué à Rio de Janeiro a été le point de départ. Il faut rappeler que plusieurs types représentés (le malandro, la mulata, la baiana etc.) ont également peuplé l'univers de la musique populaire carioca du début du XXe siècle. Dans de nombreux cas, ces types – et non tant les vrais habitants de Rio de Janeiro – représentaient le je-lyrique des compositeurs de samba cariocas. Dans cette thèse, nous cherchons à démontrer comment, dans un processus homologue à celui de Rio de Janeiro, mais moins connu, il en a été de même avec la production théâtrale de São Paulo, dont le personnage-type plus marquant – le caipira (campagnard) – a donné naissance à une tradition chansonnière qui non seulement perdure jusqu'à aujourd'hui dans la musique dite caipira ou sertaneja, mais qui a aussi joué un rôle très important dans la construction d'une certaine identité paulista.

 

Cependant, au contraire du théâtre musical carioca, qui a reçu l'attention des mémorialistes et des chercheurs , il n'existe pas d'œuvres de référence sur le théâtre musical paulistano. Ainsi, le premier défi de la recherche a été de cartographier le circuit théâtral de São Paulo. Dans un travail exhaustif, nous avons consulté systématiquement les chroniques théâtrales et les annonces payantes publiées quotidiennement par quatre grands journaux de la ville: Correio Paulistano (1914-1934), Folha da Noite (1921-1925), Folha da Manhã (1925-1934) et O Estado de S. Paulo (1914-1934). Nous avons aussi examiné quelques exemplaires d'importantes magazines paulistanas, tels que Gazeta artística, O Pirralho et Revista da Semana. Les informations recueillies ont été réunies dans une base de données en ligne, disponible sur: www.memoriadamusica.com.br/teatromusicado. Ces données ont permis d'établir quelques panoramas statistiques de l'univers théâtral musical de la ville de São Paulo, réunis dans l'Annuaire Théâtral Paulistano (Annexe 2 de la thèse), lequel, pour chaque année, présente des données relatifs: 1) au nombre de représentations théâtrales de la ville, tantôt de genres déclamés, tantôt de genres chantés; 2) aux troupes à l'affiche et à leur origine (étrangère, carioca ou locale); 3) aux genres théâtraux les plus joués; 4) aux pièces musicales qui ont eu le plus grand nombre de représentations.

 

Le double effort entrepris dans la recherche –cartographier le théâtre musical de São Paulo et comprendre le rapport entre les chansons y diffusées et la construction d'identités – a produit une thèse à la fois panoramique et monographique. Ces qualités apparaissent, respectivement, dans chacune des deux parties qui composent le travail. Dans la première partie (chapitres 1 et 2), basée principalement sur les informations recueillies dans la presse quotidienne, nous cherchons à tracer un vaste tableau de l'univers étudié. Dans la seconde partie (chapitre 3), basée sur les analyses des livrets et des partitions, nous nous concentrons sur différentes caractéristiques de la musique jouée au théâtre.

 

Dans le chapitre d'ouverture (« Divertissement et culture de masse a São Paulo »), le théâtre musical paulistano est situé dans son rapport étroit avec le processus d'urbanisation et de modernisation de la ville de São Paulo. On examine l'ébullition culturelle de la capitale paulista au cours des premières décennies du XXe siècle, quand la ville provinciale prenait l'air d'une métropole et les divertissements publics acquéraient une importance grandissante. La brusque croissance démographique, poussée par l'immigration en masse dans le contexte de l'expansion de l'économie caféière et accompagnée d'un projet de modernisation qui n'intégrait pas tout le monde, a créé dans la capitale paulista une « foule de déracinés » formée non seulement par des Italiens et des caipiras – représentants, respectivement, de la modernisation poussée par le café et du passé traditionnel rural –, mais aussi par des immigrés d'autres nationalités (Portugais, Espagnols, Allemands, Syriens etc.), des migrants de plusieurs États du Brésil et des ex-esclaves. Le théâtre musical produit dans la ville, ainsi que les productions humoristiques en général, a représenté cette diversité dans un mélange caricatural, articulant des images afin de compenser l'inexistence d’un trait d'identité ou d'affinité sociale.

 

La cartographie du circuit du spectacle a corroboré quelques présupposés initiaux qui manquaient de vérification statistique. D'abord, elle a confirmé la primauté du théâtre au sein des divertissements publics de la ville. Comme le prouve le grand nombre de salles concentrées au centre-ville, mais également éparpillés dans les quartiers, dont la capacité était suffisante pour accueillir une parcelle significative de la population. La recherche a aussi attesté la diversification des spectacles, en découvrant une grande variété de genres, dont quelques-uns (comme les opéras populaires et les « chansons mises en scène ») étaient destinés à des niches spécifiques de la population, notamment les immigrés et leurs descendants.

 

Le deuxième chapitre (« Le théâtre musical à São Paulo ») décrit et analyse le mouvement théâtral de la ville, en focalisant la production locale. Pour ce faire, nous répertorions les revues et burletas écrites par des auteurs paulistanos et mises en scène par des compagnies locales. Ayant comme décor la capitale ou l'intérieur de l'État de São Paulo, ces pièces ont contribué à la création d’un imaginaire autour du paulista et du paulistano.

 

Les balises temporelles de la thèse (1914 - 1934) correspondent aux moments d'ascension et de déclin de cette production. En effet, ce n'est qu'avec le déclenchement de la Première Guerre que le marché théâtral de São Paulo s'est développé. Moins impactée par la conflagration que la ville de Rio et connaissant un taux de croissance étonnante, la capitale paulistana attire les compagnies théâtrales cariocas. D'autre côté, les obstacles à la circulation maritime ont empêché l'entrée et la sortie de compagnies étrangères du pays. Celles qui sont restées recluses dans la ville ont fini par se réorganiser localement, en s'adaptant au goût du public local. D'autres troupes ont été formées par des artistes paulistas qui jusqu'alors suivaient des caravanes théâtrales à l'intérieur de l'État ou se présentaient dans les petits cirques-théâtres de quartier, mais qui devant la croissance du marché de travail à São Paulo ont trouvé de la place dans les grandes salles du centre-ville. Une de ces compagnies a été celle du comédien Sebastião Arruda (1877-1941), qui a diverti le public de São Paulo pendant plus de dix ans. Spécialisé dans les types caipiras, Arruda a été le créateur d'une école de caractérisation suivie plus tard par des artistes très populaires, comme Genésio Arruda et Mazzaropi.

 

Comme les troupes, la dramaturgie paulistana a également connu une embardée après 1914. Dans cette année, une compagnie théâtrale venue de Rio de Janeiro a mis en scène S. Paulo future, une « revue de coutumes paulistas » écrite par deux auteurs locaux: le journaliste Danton Vampré, responsable du livret, et le compositeur Marcello Tupynambá, qui a mis en musique la pièce. Le succès retentissant de la revue, devant un public désireux de se voir représenté sur scène, a encouragé la production dramaturgique locale, en enclenchant une phase tout à fait florissante du théâtre musical paulistano, pendant laquelle les librettistes et les compositeurs autochtones se sont multipliés. La majorité de ces artistes n'ont pas connu la renommée des cariocas. De toute façon, ils ont été responsables d’une importante production locale qui atteste les spécificités de la chanson paulistana. À travers les types, les décors, les ambiances et les chansons, ils ont problématisé ce qu'était « être paulista » en proposant des discours textuels et musicaux qui, différemment de leurs auteurs, se sont perpétués dans la mémoire collective.

 

Cependant, en milieu des années 1930, les petites troupes locales finissent par disparaitre, soit en fonction de la concurrence des grandes compagnies cariocas, de plus en plus capitalisées, soit en fonction du manque de salles de spectacles, qui commencent à se faire rares ou à se transformer en salles de cinéma. Sebastião Arruda, qui avait connu un grand succès auprès du public paulistano dans les années 1910 et 1920, finit ses jours dans la misère, en travaillant dans des cirques-théâtres, puisque les grandes salles lui avaient fermé leurs portes. Les auteurs de revue ont à leur tour émigré vers les spectacles déclamés. Peu à peu, on assiste au déclin du théâtre musical, bien que quelques compagnies de revue cariocas ont continué d'occuper de temps en temps les théâtres du centre-ville jusqu'aux années 1950.

 

Dans le troisième chapitre (« La musique en scène »), nous traitons de l'importance du théâtre dans le processus de professionnalisation des instrumentistes, des chefs d'orchestre et des compositeurs de São Paulo. Nous décrivons le circuit de production, de distribution et de consommation de la musique, qui comprenait non seulement le théâtre, mais aussi l'édition musicale, les orchestres militaires et, plus rarement, l'industrie naissante du disque. Enfin, nous présentons quelques caractéristiques de la musique diffusée au théâtre, en nous concentrant sur l'évolution du chant dans les pièces théâtrales. Nous démontrons que, loin de constituer un simple espace de diffusion, le théâtre a joué un rôle très important dans le processus de formation de la chanson, dans la mesure où, parallèlement au disque, il a aidé à fixer certains modèles d'articulation entre musique et paroles qui ont persisté tout au long du XXe siècle. Ces modèles se rapportent aux efforts de reproduire dans les chansons une « manière de parler » considérée représentative de certains types sociaux ou de certains contenus.

 

En soulevant des questions qui méritent d'être approfondies dans des travaux futurs, la thèse a tenté d'ouvrir des nouvelles portes à la compréhension de la culture urbaine paulistana, si hétérogène et polyphonique, au cours des premières décennies du XXe siècle.

 

 

 

 

 


 

1 J'emprunte ici les notions de « formation » et de « système » à Antonio Candido, qui les utilise afin d’interpréter les « moments décisifs » de la littérature brésilienne (CANDIDO, Antonio. Formação da Literatura Brasileira. 8e ed. Belo Horizonte; Rio de Janeiro: Itatiaia, 1997).